Introduction
Dans le monde académique, la presse, auprès du grand public mais aussi chez les régulateurs, les banques coopératives constituent une population un peu à part. Elles sont souvent étudiées comme un ensemble homogène d’acteurs en faisant des comparaisons avec les banques conventionnelles à structure actionnariale. La plupart des conclusions amènent soit à considérer que le modèle coopératif est bien supérieur au modèle bancaire classique (argument souvent retenu par les plus fervents militants du modèle), soit finalement à considérer que tout le monde fait la même chose (argument souvent retenu par le régulateur pour éviter d’avoir à légiférer spécifiquement pour ces structures).
Ces débats nous apparaissent stériles et d’un intérêt assez limité. Les arguments scientifiques pour tenir l’une ou l’autre des positions sont souvent assez faibles. La performance supposée supérieure du modèle coopératif dépend aussi de nombreux autres paramètres que leur statut ou leurs valeurs. Le régulateur, de son côté, ne peut ignorer le cadre juridique spécifique des coopératives et des mutuelles, la diversité des modèles de gouvernance de ces structures, au moment où il envisage de nouvelles régulations. Si le secteur bancaire coopératif souhaite peser face à des acteurs qui ne lui sont pas forcément toujours favorables, il doit faire l’effort de mieux expliquer, dans la transparence, la réalité de ses modes de fonctionnement. Parmi eux, la question de la gouvernance des structures est un sujet central, souvent pointé du doigt par ses détracteurs. Par gouvernance nous entendons ici les processus de décision au sein des structures coopératives aussi bien entre les différents conseils d’administration ou surveillance des différentes entités des groupes (structure politique), qu’au niveau managérial entre les différents organes de direction (structure managériale).
L’objectif principal de cette étude est d’ouvrir la voie à un véritable programme de recherche sur l’identification des différents modèles de gouvernance et de prise de décision. Car les interrogations que soulèvent ce modèle sont légitimes pour des instances extérieures, en particulier les régulateurs. Il est légitime qu’ils se posent la question de savoir comment des entités fortement décentralisées sont contrôlées ? Comment elles gèrent leurs risques ? Qui porte la responsabilité des décisions face aux autorités comme face aux sociétaires ? Qui décide des grandes orientations stratégiques ? Il appartient au secteur bancaire coopératif de répondre à ces questions, de rendre plus lisible ses modes de fonctionnement. C’est une condition nécessaire à la reconnaissance de leurs spécificités.